Mise en place d'un studio de recherche de création audiovisuelle
à l'école des Beaux-arts de Luang Prabang

La galerie du cartable - Bandits-Mages

JOURNAL DE BORD

12/04/2010

Arrivée à Hanoi, il est 6h41 du matin, 1h41 en France. Je voulais passer un petit coup de téléphone, raté!

Sur facebook, une camarade citait une célèbre phrase des Shadocks : "s'il n'y a pas de solution, c'est qu'il n'y a pas de problème". Je ne peux m'empêcher de me la remémorer en cet instant. Je vis à nouveau cette expérience comme il y a deux ans où mes camarades et moi étions restés douze heures dans ce même aéroport, de tourner en rond dans un carré...

Les boutiques et le petit restaurant s'ouvrent à peine et je suis la seule passagère à errer entre les immenses baies vitrées. Comment habiter le vide ? Réponse : j'allume l'ordinateur et je me fous la tête dans l'écran.  Est-ce que comme Charles Bukowsky devant son mac, un horizon immense va s'ouvrir? Pas sûre ...

Il y a deux mois, lors d’un précédent voyage, nous avions fait escale à Bangkok : plusieurs kilomètres de magasins duty free, des décorations invraisemblables, un salon de massage, des gadgets à n'en plus finir, le paradis du consommateur qui croit faire une bonne affaire en étant débarrassé des taxes. Ici à Hanoï, la sobriété et l’étrangeté rendent immédiatement l'achat désuet. Si j'achète quelque chose, je saurai que c'est une pulsion consommatrice et rien d'autre !

Je me souviens aussi, car assise deux ans plus tôt exactement à la même place, de ce touriste anglais qui du haut de son physique massif avait fait un scandale en terrorisant les jeunes filles du petit restaurant parce qu'il avait vu passer un rat. Quel connard ce type!

hanoi

12/04/2010 quelques heures plus tard

Me voilà bloquée à l'aéroport d'Hanoi. L'étrange et sympathique escale se transforme péniblement dans ce temps trop incertain, interminable.

J'exagère sans doute mais la fatigue aidant, difficile de distinguer les choses pour ce qu'elles sont réellement, les aléas du trafic aérien dans des pays dont le climat ne permet pas tout. L'avion ne peut pas décoller. Le temps est trop mauvais. Nous apprenons ensuite que le pilote est rentré chez lui. Nous prendrons le prochain vol!

Je lis au même moment la fin d'un livre de Copi où quelque part sur la lune une armée homosexuelle reprend le pouvoir sur des amazones cannibales pendant que des idiots d'hétéros meurent sur terre de leur bêtise. Ils serviront de garde-manger.

13/04/2010

Enfin ! Arrivée! 

À l'aéroport, j'ai été accueillie par Ounheuane (alias Nou) qui sortait visiblement d'une fête et par David.

Nous avons mangé avec Anna et Fracesc de la compagnie Les Passeurs. Ils sont très heureux d'avoir travaillé avec David et Fabrice. 
Je n'ai pas vu le film réalisé qui est une mise en scène filmée d'un conte lao : "l'Orphelin et l'aubergine". Ils sont venus une semaine et ont invité Téo et Kéo, un duo à la fois acteurs et marionnettistes qui perpétuent la tradition d'une vieille famille du théâtre lao. Ils ont avec les étudiants initiés au jeu d'acteur scénarisé et filmé le conte en un seul plan séquence grâce à la grue louma en bambou construite deux semaines auparavant.

La soirée est agréable, mais nous sommes dans le bar/pizzeria français du coin, j'ai presuqe l'impression d'être à Orléans ou à Tours. Même personnes, même habitudes...

15/04/2010

    Premier matin à Luang Prabang depuis mon arrivée.
Levée tôt, je retrouve les étudiants Sonepasith, Oudeuane, Vankham, Viengxai, Phasannanh et leurs professeurs Khamvieng et Nou. C'est un vrai plaisir de les voir. Aujourd'hui c'est PIMAY, le nouvel an lao, et ils sont prêts pour une longue journée de tournage. 

Mais! Il faut d’abord protéger le matériel contre les multiples seaux d'eau que nous allons recevoir.

Nous avançons dans des rues qui se remplissent. Très vite, il y a un monde fou. Avant la fin de la journée, tous les corps seront couverts de farine, de suie et d'eau.

Je discute une dernière fois avec Anna et Francesc avnt leur départ. Nous discutons à propos des problèmes d'argent avec l'Ecole des Beaux-Arts.

Après quelques aller et retour dans le marcher bondé, de l'autre côté du Mékong, nous nous retrouvons sur une plage qui accueille quelque chose qui se situe entre la cérémonie officielle (le vice-président du Vietnam invité), la kermesse et la free party. C'est, disons-le, dément ! pour reprendre un terme récurent de David. Je (re)découvre les trans (katrui) de Luang Prabang et leur liberté. Nos étudiants filment consciencieusement sans perdre de vue qu'il s'agit d'une fête. 

Filmer et danser!

Sonepasith est très à l'aise avec la caméra, c'est une évidence. Il ne semble se priver de rien. Fassananh aussi. Kam Vieng, le directeur des études des beaux-arts, est avec nous. Toujours aussi généreux et prévenant.

Arisay, patron d'un café à Luang Prabang, royaliste et originaire de Vientiane, explique à David que cette fête a malgré tout beaucoup perdu de ses origines. La kermesse, c'est son terme pour en parler... Tous les stands qui bordent les rues viennent des français. Il y a six ans, c'était encore très différent, ça ne ressemblait pas à un vaste commerce. Les Laos s'invitaient mutuellement chez eux dans un esprit de don. C’était ben ainsi qu’en France, les laos vivant à Bourges nous avait présenté cette fête.

Le tourisme y est pour beaucoup dans les déviations de ces cérémonies et des grandes manifestations populaires. Mais le Laos est aussi, comme beaucoup  d'autres pays dans le monde, victime d'une hyper marchandisation et de la perte de ses origines. Et c'est d'autant plus vrai dans ce pays qui a vu passer la colonisation thaïlandaise, le protectorat français et une révolution culturelle sévère en 1975.

Perte du sacré.

Arisay nous dit néanmoins que si nous savons regarder, nous trouverons quelque chose de particulier. Il espère que nous saurons le filmer.

Nous avons regardé les images des étudiants et nous sommes emballés. C'est très court et surtout en mouvement.


16/04/2010

Aujourd'hui, deuxième jour de PIMAY. Cette fois, nous avons suivi le défilé. Toujours arrosés par des litres d'eau, et barbouillés de farine et de colorants.

Les étudiants prennent en charge le matériel et surtout leur film. Depuis que nous sommes venus en janvier, le changement est énorme. Les techniques filmiques sont variées et se précisent.

Avec tout ce que nous avons récolté, nous devrions pouvoir faire un film, voire plusieurs films, hybrides. Nous n'échapperons sans doute pas au documentaire, mais nous en ferons autre chose, c'est certain!

Le défilé était très vivant, entre extrême organisation (chacun connaît parfaitement son rôle) et anarchie totale. Il ressemble à un carnaval qui rassemble les traditions, les activités et groupes de la vie lao : arts martiaux, communautés, écoles... avec en tête Miss Luang Prabang, élue la veille... Nous sortons de là épuisés.

Je regarde les films des étudiants, c'est déjà un film en soi. Je me rends compte que l'utilisation de petites caméras à carte, légères et proches de l'appareil photo, et notre habitude de mettre des films brut sur facebook provoquent une disparition de l'habillage, du montage, de l'organisation des images.

Et pourtant..

Fabrice lui-même me dit qu'il n'a plus envie de monter ce qu'il filme. Le montage se fait mentalement. C'est tellement vrai que lorsque je mets bout à bout sur une même page Internet les séquences de David pas encore montées, un film construit pré-existe. 

Malgré tout, le montage reste un langage qui permettra d'écrire le film avec les étudiants et j'ai hâte de commencer.

Oudeuane s'est vraiment approprié le son. Dommage, c'est saturé! C'est une habitude ici d'écouter un son crade, saturé, diffusé à fond dans des enceintes énormes.

Hier soir, j'ai rencontré Douk jeune "chef" trans qui aime déjà beaucoup David et Fabrice. Si nous revenons l'année prochaine nous pourrons peut-être cette fois loger chez lui/elle. Sa maison guesthouse semble très agréable. Elle est juste en face de la maison de Thavisay, un jeune professeur de l'école qui était encore étudiant il y a deux ans. Il avait travaillé sur le dialogue fictif n°9 de la galerie du cartable, Chercher Cinéma.

17/04/2010

Ce matin, nous avons suivi Thavisay qui normalement porte un des masques du PounyerNyanyer. Ces masques racontent l'origine de Luang Prabang. Ce sont des ancêtres (grand-mère et grand-père des origines) accompagnés d'un lion. Nous n'en savons pratiquement rien.

C'est un cérémonial. Un groupe de gens, la famille de Thavisay dont son père qui occupe une place importante, s'occupe des offrandes. Les femmes arrosent d'eau avec des branches de lauriers les masques et le chien... Comme toujours je remarque que ces cérémonies sont extrêmement sérieuses et très simples à la fois. Aucune attitude de circonstance. Ce sont les gestes et les temps de méditation qui amènent au sacré sans se séparer de la vie telle qu'elle est chaque jour. Apparemment les masques sont fabriqués, ou entretenus, je ne sais pas vraiment, au même endroit.

Lundi, je commence le montage avec les étudiants. Ce qu'ils filment est sans complexe ... des intuitions justes et une recherche qui chaque jour évolue.


21/04/2010

Nous avons beaucoup discuté hier avec Achan (maître) Luck, le directeur des Beaux-Arts, un vrai tyran, MAIS qui a une grande lucidité, et un rapport à la vie sans concession. Ce qui m'étonne particulièrement, c'est sa clairvoyance. Il nous voit et il sait qui nous sommes. J'ai déjà rencontré ça chez un agriculteur de 90 ans pas très loin de Bourges, qui portait en lui ce savoir et ce rapport au monde d'une extrême lucidité. Je le vois aussi chez des pratiquants d'aïkido qui ont largement dépassé la recherche technique et qui lisent dans chaque comportement, dans chaque mouvement ce qu'est l'autre. Je suis à chaque fois stupéfaite!

Penser bien! c'est ce qu'il ne cesse de nous répéter. Voir ! Celui qui veut penser en réalité ne pense pas !

Il nous explique qu'ici, et on le ressent, on est responsable de ce que l'on donne et pas de ce que l'on reçoit. On devient responsable de ce que l'on reçoit parce qu'on le transmet. Ça ressemble à une évidence mais pas vraiment ! Car ça supprime d'emblée tout phénomène de reconnaissance. Nous faisons beaucoup, mais pourquoi ?

J'apprends beaucoup de la pensée orientale, autrement que par la théorie et la traduction occidentale, même fidèle à cette pensée. Ça m'éclaire encore sur la pratique martiale.

La lutte (commune) ici n'est pas simple. Beaucoup d'incompréhensions. L'argent est un sujet très compliqué. Nous sommes les riches occidentaux et il faut sans cesse donner plus. Mais qu'est-ce que nous amenons?

Ici l'expérience construit la pensée et elles avancent conjointement sans jamais se séparer. La pensée ne précède pas l'expérience. Nous ne le savons pas vraiment. Nous sommes, Fabrice, David et moi, très vite très compliqués (moi peut-être plus qu'eux encore), très intellectuels et réflexifs (analyse, analyse...), et nous nous prenons des revers sévères en pensant une chose qui n'existe pas encore, sans prendre le temps de sa construction.


24/04/2010

Cette semaine est passée à toute vitesse, pas de temps pour écrire.

Le sujet exact des études que nous proposons repose sur les modes de représentations et de transmissions dans la vie quotidienne, mais maintenant le rapport à l'histoire lao a pris de l'importance. Nous le découvrons un peu plus tous les jours dans ce qui a été transmis, pas transmis, réapproprié par les autorités, refusé par les autorités, l'influence du tourisme sur l'organisation des fêtes, même religieuses, etc. Tout est relié.

Nous découvrons aussi petit à petit les familles et leurs "spécialités", leur rôle de transmetteur justement. La famille de Thavisay est celle qui est en charge du PounyerNyanyer. Plus globalement nous découvrons les pratiques musicales, les danses, les rites, les mises en scènes, trop peu exprimées aux beaux-arts.

Plus concrètement, cette semaine nous avons travaillé sur PIMAY. Nous sommes en montage avec les étudiants. Nous avons l'idée de faire un plateau télé et les diffuser dans Luang Prabang. Fabrice planche sur la question d'un nouveau cartable vidéo. Il pourrait y travailler avec les étudiants à partir de matériaux et de techniques locales. Le studio semble pouvoir se finir lundi.

J'ai commencé les cours de lao et je suis très enthousiaste bien que toujours handicapée par mes problèmes d'attention.

L'autorité de monsieur Luck nous a perturbés et nous avons compris que les points de rupture seront réguliers. Et pourtant quand ces points de ruptures approchent, l'atmosphère se détend immédiatement. 

Nous avons fait un grand repas dans un restaurant au bord du Mekong avec monsieur Luck, Boukine (le futur directeur ?), sa femme, Bougnalith (toujours très à part, y compris dans sa façon d'être, il vient de la famille royale), Nou, sa femme et sa fille. Le repas est excellent, la vue exceptionnelle et nous passons une excellente soirée. Nous parlons des méthodes de travail qui doivent tenir compte des rôles de chacun et d'une hiérarchie dans l'école. Une organisation sociale.

Le montage avec les étudiants se passe très bien. Je découvre quatre d'entre eux vite à l'aise et transmettent ce qu'ils savent : Fasananh, Sonepasith, Oudeane et Hak Thoui. Les quatre autres sont plus en retrait et surtout moins à l'aise avec les ordinateurs.

Quatre sujets sont en préparation.

Nous avons travaillé tous les jours de 8h30 à 13h30. Pendant ce temps, les autres étudiants travaillent avec Fabrice et David sur le studio.

Nous sommes invités par Thavisay à une cérémonie très spéciale que nous ne pouvons pas filmer dans la maison des PounyerNyanyer. Nous y croisons Francis Engelmann. C’est une cérémonie qui invoque les esprits des deux villages, des fantômes. Un femme medium entre dans un coma court, choisit des vêtements et incarne un de ces esprits, parfois longtemps, parfois peu de temps. C'est très joyeux et surtout d'une grande force. Là, nous voyons justement des modes de représentation, la vie et le symbolique : La femme medium que l'on voit renifler des aliments, en fait se nourrit de la part subtile de ces même aliments. Les personnes présentes viennent parler très naturellement avec les esprits. Repas et alcool. Nous buvons beaucoup (encore). C'est d'une grande puissance et d'une grande légèreté.

Le lao lao et la bière. nous en buvons beaucoup, souvent, invité par Nou ou à l'improviste par les Laos.


25/04/2010

Nous mangeons souvent chez Nou. Nous discutons beaucoup du projet et du reste. Quand nous rentrons, nous sommes plein de questions. Pourquoi sommes-nous là ? Jean Rouch défendait une culture. Et nous, qu'est-ce que l'on défend ?

Ce qui nous paraissait évident, ne l'est plus du tout. Nous comprenons que le programme que nous proposons n'est pas bien compris, voire pas du tout. C'est difficile de savoir, car nous sommes aussi au milieu de conflits entre les enseignants et de problèmes de pouvoir ou de place.

Nous sommes là parce que nous avons su nous retrouver sur des conceptions de l'art non séparé de la vie : être là où l'on peut inventer, dans une histoire commune où les choses peuvent circuler de manière quasi immédiate, avec ceux qui sont porteurs de savoirs, de modes de vie, de familles. 

Nous venons avec des outils pour de la recherche...


26/04/2010

Nous avons une discussion avec Sai (Souliya) qui est en résidence au Japon pour deux mois. Il prépare des films d'animation. Il a créé un petit personnage, ce qui est une constente dans l'art japonais contemporain. Les modes d'expression passent par des figures incarnées et symboliques.

Sai nous explique que n'ayant pas de master, il ne peut pas créer pour le moment son département nouveaux médias. En attendant, il a créé son groupe aux beaux-arts de Vientiane.

Nous lui parlons de l'association.
Brouillon des statuts, une première version des objets de l'association.
Nous devons être le moins abstrait possible. Concret! Répondre à comment faire...

Il attend que nous lui envoyons une version anglaise pour être sûr de bien comprendre. Nous parlons de choses et d'autres. Il nous montre son appartement via sa webcam et les nouvelles caméras avec lesquelles il travaille. Du matériel professionnel qu'il va pouvoir ramener. Sai est maintenant sponsorisé par des japonais.. Il nous parle aussi de sa génération qui veut s'ouvrir au monde et aux systèmes internationaux. Cependant son ouverture qui m'enthousiasme toujours est aussi exposée à un fonctionnement reproduisant le monde de l'art tel que nous le connaissons et qui est aussi tout ce que l'on déteste : du marketing !

Du coup, à propos des objets de l'association, nous réfléchissons à nouveau à la destination du projet. Nous avons écrit qu'il s'agit de permettre une diffusion à un niveau international, de faire venir de jeunes artistes laos comme Sai, mais aussi venus d'autres pays, des cinéastes français... Nous nous rendons compte que si c'est bien dans l'absolu, c'est aussi reproduire des modèles que nous avons toujours voulu quitter.

Nous revenons alors à nos objets d'étude car ce que nous devons avant tout défendre et diffuser uniquement, c’est le travail de recherche (à l'exemple du  service de la recherche, l'institution d'invention et de recherche créée par Pierre Schaeffer). Nous devons le préciser...

28/04/2010

Le montage avec les étudiants continue. Nous faisons un lexique français-anglais-lao pour le logiciel utilisé, mais aussi pour les commandes informatiques. Nous trouvons des rapports dans les images qui deviennent intéressants. Apprendre et aussi enseigner en commençant par une forme documentaire est extrêmement difficile. Comment choisir les images, quelle forme donner à chaque film ?

Nous regardons la télévison lao. C'est sans complexe sur les effets, les bruitages, l'utilisation du son. C'est comique et les présentateurs ne se prennent pas du tout au sérieux. La plupart sont très jeunes. J'adore la chaîne Lao Star. Du coup, nous cherchons des formes plus télévisuelles que documentaires.

David se lance avec les étudiants dans la réalisations de films pédagogiques qui sont à la fois un mode d'apprentissage du film, mais aussi des films qui expliquent en soi ce qu'est filmer. David a écrit un poème qui sera le sujet d'un premier film : comment filmer avec un baton ? comment voir?

HakTui est très bon acteur. À travers ces réalisations, nous découvrons aussi les talents de chaque étudiant. Il faudra montrer ces talents dans la télévision.

Pendant ce temps, notre "worker" menuisier, Tith, et ses amis travaillent toute la semaine sur le studio qui prend forme.

Je tourne en rond sur une question cruciale : où trouver des financements ? Le travail quotidien est si prenant que je commence à m'inquiéter sérieusement sur le temps que je peux accorder à ça. Sashiko, une styliste japonaise, est de retour. Nous avons rendez-vous cette semaine. Elle nous a dit pouvoir nous aider.

Soulasay est notre professeur de Lao. Il est très patient. Ces cours structurent notre apprentissage de la langue. Nous comprenons l'organisation des phrases, des mots, les rapports, les accents. C'est une langue riche qui peut produire sans cesse du sens et des idées nouvelles par des associations qui ne sont pas toujours utilisées, mais qui sont possibles. Deux mot associés forment une idée. Il faut aussi faire des efforts important pour ne pas vouloir parler selon la structure du français. C'est très difficile, mais passionnant et plein de poésie.


29/04/2010

Le cours de montage est difficile avec quelques étudiants. Qu'est-ce que la technique ? Des ciseaux, mais pour découper quoi ? Ne pas voir celle qui sent, en fait celle qui se nourrit de la part subtile des choses. Dans l'enseignement de l'aïkido, la technique est un moyen d'étude de quatre grands principes : le shise (la posture), le mawaï (l'espace-temps), le kimisubi (aller dans le sens du mouvement), le kinonagare (absorber l'autre dans le sens du mouvement). Chaque principe étant relié.

Ces principes et cette approche de l'apprentissage globale sont si orientaux que je me demande comment les retrouver ici, dans une façon d'expliquer le montage (sans non plus transposer bêtement, il ne s'agit pas de ça). Voir une forme globale et découper, travailler à l'intérieur. C'est peut-être une erreur, mais surtout ça participe d'une vision globale, non fragmentée des choses.

Aussi David a-t-il raison: ce chemin n'est pas le mien mais celui des étudiants. Il faut faire attention. Laisser faire, lâcher prise.


Nous réfléchissons à une émission télé. David élabore un scénario : où quelqu'un dirige une télévision avec un morceau de glaise, où des tableaux deviennent de la vidéo, où se met en scène la danse, la musique, la vie lao. Le film finirait sur un remake de "Thriller" de Mickael Jackson et y seraient insérées des parties de PIMAY amenées par chaque scène. Et une pub sur les outils fabriqués.


Avec Sonepasith, nous travaillons sur le montage d'une partie du film sur PIMAY à partir de la bande son. Il me dit : "interesting". Il faut que je le laisse faire. Il aime bien que je lui montre des choses, mais pas trop quand même. Il fait la bande-son du film. Je découvre du coup qu'il est, en plus d'être excellent danseur, un musicien expérimenté qui joue d'un nombre impressionnant d'instruments. La semaine prochaine, nous aimerions faire des enregistrement et faire un montage son à partir de scènes filmées dans lesquels il jouerait plusieurs instruments.

Fassanah est devenu le responsable du matériel pour les étudiants et apprend le montage sous Linux. Il veut faire ses propres films.


30/04/2010

Le studio solaire est fini. Il est splendide.

Une première scène est filmée à l'intérieur pour le film "Kit DI" (penser bien), le film pédagogique (d'étude) proposé par David.

Dans ce film, les temps s'enchaînent (adid, le passé, Pha tchou ban, le présent, anakoth, le futur) et font de ce film un cheminement, celui de la pensée, pour celui qui doit voir le film sans sa caméra.

Au montage, avec les étudiants se pose la question : comment faire figurer ce cheminement ? Par quelles images?

L'orage arrête le montage. Impossible de continuer sans risquer une coupure de courant. La pluie tombe (Phone thot). Elle tombe, elle tombe. L'eau coule.

C'est parfait, nous nous servirons des vues du Mekong pour marquer le passage d'un temps à un autre, le courant de l'eau. Dans un sens, puis dans un autre.

02/05/2010

Vendredi soir, les riches de Luang Prabang. Une soirée où nous avons suivie Sachiko, producteur chinois, propriétaire neo zélandais, 

Samedi matin, David et Fabrice me parlent d'un femme française et lao avec qui ils ont discuté hier soir. Elle est la fille d'un producteur de cinéma français. Elle peut nous aider.

Elle leur a parlé d'une forme à laquelle nous n'avons pas pensé qui est la comédie musicale et également du sens comique des lao et les joutes verbales (Molaam). Ici, les jeunes filles et jeunes garçons qui se font la cour entrent dans des séances de joutes chantées dans lesquelles ils s'envoient les pires "vannes". Pas de romantisme.

Sauf dans leur télévision.

Nous avons été invités à un mariage. Très jolie cérémonie, un bassi, de très beaux habits et des mariés qui ne sourient jamais. Ensuite repas avec tous les invités, une grande famille. Nous buvons beaucoup trop!

à suivre : l'arrivée de Michel et Monique, l'association, Vientiane, Supalack, Sonepasith, l'économie souterraine du Laos, .les rues de Luang Prabang qui se vident de leurs touristes, ..., le workshop de Michel (les adaptations laos des disparus de Saint Agil (répliqûre) et d'Aguirre)

EPISODE 2 : LE STUDIO SOLAIRE: UN LIEU POUR DES NOUVELLES PRATIQUES D'AUTO-FABRICATION ET D'ARTISANATS NUMERIQUES

Le développement du programme audiovisuel aux Beaux-Arts de Luang-Prabang, est réalisé par la Galerie du cartable, porté par l'association Bandits-Mages en co-production avec Chateauroux Undergound, et soutenu par la Région Centre et Cultures France.
Nous remercions le CCCL pour son accompagnement.
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